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  François Chaffin | Epilogue d'un auteur de garde en forme de bilan d'entrée/sortie | mai 02  
     

 

Tout ce qui rentre n'est pas d'or ; tout ce qui sort n'est pas perdu (d'ailleurs, ceux qui s'en sortent rentrent chez eux…).
En entrant à Bligny, certaines options sont validées : soit vous êtes malade, soit vous n'êtes pas malade.
Dans le cas second, vous êtes soit un visiteur, soit vous êtes venu pour exercer votre profession, soit encore vous êtes perdu.
Cette dernière option est une ironie sémantique. L'hôpital prenant également en charge les âmes perdues, ce n'est pas nécessairement une tragédie.

Mais peut-être existe-t-il d'autres manières d'entrer et d'être à Bligny.
Auteur de garde en est un exemple.
Prenez des auteurs à plume, mettez-les en bande, logez-les, nourrissez-les, laissez-les vaquer de droite et de gauche, se surprendre des lieux, et finalement écrire leurs ressentis, au fil des rencontres hasardeuses.
Bien sûr ils sont inexperts, maladroits, quelquefois décalés même : ils parlent de Bligny avec de la liberté plein la langue, hors les littératures techniques et réglementaires en usage à l'hôpital.
Ils sont les intrus, les allogènes, les indésirés ; mais ils sont là, à la place des artistes, au sein démangé de la grande organisation du quotidien, c'est-à-dire entre grain de sable et poil à gratter.

Alors, équivoque, inutile, pertinente : quel bilan tirer de la présence d'écrivains en milieu hospitalier ?
Fallait-il les laisser entrer ?
Peut-on écrire l'hôpital en dehors des us et des coutumes de la grande syntaxe des corps ?

(...)

Et ils sont partis.
Auteurs de garde là, auteurs de garde plus là… (L'hôpital n'a pas toussé d'un iota : l'absence des artistes se considérait moins encore que leur présence.)

Ensuite les remous sont apparus.
Courriers électroniques furieux de quelques concessionnaires en corps et couloirs, mais aussi force témoignages de sympathie, d'intérêt, émanant de quidams alléchés par notre petite entreprise de bavardage.

Alors, les artistes en résidence à Bligny, à prescrire ou à proscrire ?
Peut-on émettre de l'endroit un autre message que le protocole épistolaire des professions soignantes ?
Faut-il ne donner de cette place qu'une vision technique et commerciale ?
Les malades, dont on nous a dit qu'il était “dégradant “de rendre images et sons, ne s'appartiennent-ils plus, dès lors que les médecins les ont consignés sur le lit d'une chambre numérotée ?
Pourquoi tant de crispation à l'endroit d'une liberté de ton, si elle demeure respectueuse, humoristique ou compassionnelle vis-à-vis des habitants de Bligny ?
Et quel rôle que celui de l'artiste, sinon restituer une vision transposée du réel, dans laquelle son média opère une dilatation des choses appréhendées, afin d'extraire du quotidien un jus singulier, propre à enrichir notre perception, notre sensibilité, en atténuant nos certitudes…
Faut-il amputer les artistes en résidence de toute a-normalité ?

     
  NB : La résidence est achevée mais le site continue à en exposer les traces. A la mi-février 2003, en co-édition avec Brocéliande, parution du livre Auteurs de garde. Tous les détails sur cette page  
     
  Maison fondée en 1903 © BS  
 

 

 
 

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