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Les dix-neuf sens

 
  Chacun des 19 jours, un sens nouveau décliné en simultané par les différents auteurs.  
     
  Le dix-neuvième sens  
     
  Filip Forgeau | Le sens de la vie | 26-04-02 | Quoi d'autre ce jour ? | Quoi d'autre de cet auteur ?
     
 

Naître, grandir, mourir.
Terriblement excitant, non ?
Voir naître, voir grandir, voir mourir.
Terriblement excitant.
A part ça, quelques cris, quand on manque d'oxygène. Et la boucle est bouclée.
Le sens de la vie, c'est une trotteuse qui compte les secondes.
Tic tac, tic tac, tic tac.
Tic tac, où est-ce que je suis ?
Tic tac, qu'est-ce que je fais là ?
Tic tac, pourquoi je fais ça ?
Tic tac, c'est par où la sortie ?
Tic tac, c'est déjà fini ?
On est tout plein à faire la queue. C'est où le sens de la file ?
Et on enfile des perles pour faire de grands colliers de fleurs qui ressemblent au bonheur. Un avant-goût de paradis. Merci Bounty.
On se révolte un peu, comme ça, juste ce qu'il faut. Histoire de faire un peu de gymnastique. On fait même du saut à l'élastique, histoire d'avoir des sensations.
Et puis on rentre à la maison. Terriblement excitant, non ?
On s'excite un peu, les uns, les autres, le clitoris, le bout du gland, pour ne pas être trop malheureux.
Terriblement excitant.
Allez, salut, longue vie !

 
     
  François Chaffin | Le sens de la vie | 26-04-02 | Quoi d'autre ce jour ? |
Quoi d'autre de cet auteur ?
 
     
  Ton père ta mère
Surtout ta mère
Se plaisent se prennent d'amour
Du lit du tapis de la table de la cuisine
On ne s'en souvient plus
Qu'importe un bébé
Ta mère surtout ta mère
C'est toi tu gueules t'époumones
T'es là enfin venu au monde
Le monde il tourne tu tournes avec
Ton père ta mère ton frère ta soeur
Petite moyenne et grande école
Tes jouets tes noëls tes vacances tes copains
Tes ronds dans l'eau tes jeux tes rires tes larmes
Tes croûtes tes bêtises les câlins
Surtout ta mère
Ta maison ton bahut tes rentrées
Tu pousses t'es grand maintenant
Tu comprends des choses
Tu comprends pas tout
Tu commences à comprendre
Qu'il y a des choses qui ne se comprennent pas
Tu pousses ton acné ta bite ça t'occupe
Les quilles les filles au diable les billes
Tu fais le beau t'essayes ça marche ça marche pas
Tu pleures tu pleures pas tu te rases tu te rases pas
Ton père ta mère ta mère encore
Tu veux ta route ton pognon ta décision
Tu te pousses toujours
Dans le dos
Des ailes d'adultes
T'as un appart' une voiture un boulot
T'es libre t'avances sur une route
Ta route enfin t'es pas tout seul
Mais tu pousses
Des coudes des dents des poings
T'es pas tout seul
Ta régulière tu baises
A droite à gauche un peu aussi
Des cris des larmes des scènes
Elle part t'es seul ta route s'égare
Tu comprends pas
Ton père il meurt
Surtout ton père
Tu comprends que tu comprends pas
Que tu comprendras plus
T'es triste
Surtout ta mère
T'es seul tu baises quand même
T'avances une route t'avances quand même
Tu pousses t'es pas si vieux
Ta mère elle meurt
T'es seul surtout ta mère
Ton frère ta soeur tes neveux
T'as plus le goût
Tu vas tu viens tu recommences des chemins
Des sorties de route
Des travers
T'avances encore
Surtout t'es seul
Tu pousses t'avances tu tousses t'es pas si vieux
Tu tousses saloperie d'hérédité
T'avances plus beaucoup
Tu baises plus beaucoup
Surtout tu tousses
La nuit le jour et l'hôpital
T'avais pas compris
L'hôpital
Ton frère ta soeur tes neveux
Ton frère ta soeur
Ton frère
Personne plus personne
T'es seul tu tousses
Ça pour tousser
Tu comprends plus rien
Tu pleures pas
T'as plus de larmes plus de route
T'avances plus à rien
Tu t'arrêtes surtout tu t'arrêtes
Tu t'en clopes une dernière
Tu tousses tu tousses tu tousses
Tu passes
Tu passe-passes
T'es plus là
Et ça fait une vie de passée
Dans le même sens que tous.
 
     
  Sabine Mallet | Le sens de la vie | 26-04-02 | Quoi d'autre ce jour ? | Quoi d'autre de cet auteur ?
 
     
  On aura beau dire, chercher des principes à la vie ou des raisons de mourir, comme on cherche des poux ou comme l'on récite une leçon, vouloir donner un sens à la vie reste alchimie de pacotille. On se réchauffe peu au feu des pierres mais prou à celui des autres. On pourra toujours cogner et hurler, voire s'en plaindre ou en rire, entre une vie de fossile ou une vie d'hirondelle, faut-il choisir ? A tout prendre, je prends tout. Même si d'aucuns me savent bras trop courts et tête bouchée.
Il est tant de panneaux indiquant la sortie à Bligny que malgré quelques sentiers interdits, je crois que j'ai la solution. Il n'est de mauvaise vie que celle à sens unique.