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  Filip Forgeau | Le garde-frontière | 22-04-02
     
 

Et moi, je suis là, je suis le gardien de ces lieux. Je ne suis là que depuis deux semaines, mais les gens me connaissent bien déjà. Quand ils ralentissent devant ma barrière, ils me saluent d'un signe de tête, ou d'un signe de la main pour les plus chaleureux. C'est rare qu'ils me parlent, mais ce n'est pas très grave parce que j'ai mes plantes vertes, ma télévision et mon journal. C'est mon oxygène à moi dans ma guérite en verre.
Toute la journée, les voitures passent, sans jamais s'arrêter. Combien ? Des centaines, mais je n'ai jamais compté. Des rouges, des grises, des blanches, des bleues, des vertes, des jaunes. Des noires aussi. Et puis des ambulances, bien sûr. Elles font le moins de bruit possible quand elles approchent des deux mots Silence Hôpital. Deux mots qui en imposent, quand même.
Et moi, je suis en quelque sorte l'aiguilleur du ciel de l'hôpital du silence. Ici, les avions font moins de bruit qu'ailleurs. Faut dire qu'ils sont interdits, les avions, même si on n'a pas mis de panneau pour les interdire, parce que l'on a sans doute jugé que c'était inutile. Parfois, quand même, il y a un hélicoptère qui se pose dans le parc, juste sur la croix qui marque l'endroit de la piste d'atterrissage qui lui est destinée. Pour les urgences. Mais c'est rare. Je n'en ai pas encore vu depuis deux semaines.
La nuit, c'est plus calme. Je n'ai pas non plus compté les voitures, quelques dizaines tout au plus. Des rouges, des grises, des blanches, des bleues, des vertes, des jaunes. Des noires aussi. Et puis des ambulances, bien sûr. Pour les urgences de nuit.
Moi, la nuit, je peux me consacrer presque entièrement à mes plantes, à mon journal, à ma télévision. J'ai moins de gens à aiguiller, et la barrière reste plus longtemps fermée.

 
     
   
     
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