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  François Chaffin | Portrait de Jean| 19-04-02
     
  Cafétéria de Fontenay, matin, je parle avec Jean.

Jean : survêtement qui aurait brûlé par le bas, veste mi-longue de plaisancier sans bateau, impossibles mocassins.
Jean m'a reconnu des suites du reportage diffusé à la télévision, la veille au soir, dans lequel il s'est aussi distingué, de dos et de loin, au milieu d'un panoramique du parc.
Confusion : il me prend pour le réalisateur (j'étais pourtant un des héros de ce reportage), me demande une copie sur le champ, et cela semble très important à ses yeux, parce que la télé ce n'est pas n'importe qui…
Il ajoute que nous sommes des lofteurs et se préoccupe de nos conditions de vie.
Des lofteurs…
Confusion et consternation.
Maudits journalistes maudits !

Je passe, nous bavardons, griffe l'adresse du site en première page de son Parisien, et lui explique l'ordinaire de notre travail à Bligny.
— Ça c'est quelque chose qui aurait rudement intéressé ma fille...
Il m'interrompt par ces mots. Ensuite quelques secondes de silence s'étirent et finissent au comptoir.
— Ça c'est quelque chose qui aurait rudement intéressé ma fille...
Je ne le quitte plus des yeux. Il regarde son café, ses lèvres bougent encore mais ne produisent pas de son.
Tout reste dedans.
Des fissures courent sur son visage, ses lunettes, sa position.
La musique, les gens, le percolateur, et moi ; tout semble suspendu, remis à plus tard.

Dix secondes, il relève la tête, me salue et s'en va.
Je commande un autre café.
 
     
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